Stephen Martin a été reconnu par ses pairs meilleur mixologiste de France en 2009.
Consultant, conférencier, historien, il est l’ambassadeur de nombreuses marques Françaises : Saint James et La French Svp. Il a deux licences en psychologie.
Il a fait parti du jury du concours The Bartenders Society en 2024.
Interview.

Quel est ton parcours professionnel ?

Je suis autodidacte. Certaines personnes se découvrent une passion et un intérêt pour le métier de barman, et vont faire des écoles de bar de 6 mois à 2 ans, ou une école hôtelière, avec une mention complémentaire bar. J’ai commencé plongeur dans un restaurant et puis j’ai monté les échelons. Le restaurant t’emmène au bar, et le bar au cocktail. J’ai continué à gravir les échelons. J’ai monté un bar indépendant, puis j’ai travaillé dans le bar d’un palace.

Constatez vous une tendance sur le sans alcool ou le low alcool ?

Techniquement parlant, dans l’histoire du bar, boire léger ne veut pas dire boire « fort ». Ce qui est important c’est l’équilibre. Il y a beaucoup de cocktails avec beaucoup d’alcool, mais sans équilibre. Il y a une différence selon les pays également. Dans les pays anglo-saxon, ils ont culturellement une tendance à boire fort. Ce qui est certain c’est que tout est affaire de cycles.
Dans le livre de Jerry Thomas, « Bartenders Guide: How To Mix Drinks » qui date de 1862, l’auteur parle déjà de « temperance drinks » qui est la version sans alcool d’un cocktail avec alcool.
On a cependant aujourd’hui une tendance dans le monde du bar, c’est la science. Côté technologie, on a fait en 5 ans des bonds considérables et ça va même parfois trop vite parce qu’il ne faut jamais oublier qu’à la fin, le secret d’un bon bar, c’est de proposer un bon verre mais c’est surtout une affaire de barman. Ce que l’on met dans la technologie on oublie parfois de le mettre dans l’humain. Avec de la technologie je peux produire vite et de manière constante mais il ne faut pas oublier l’humain.
Autre tendance que j’observe, c’est  le « crossover », c’est la passerelle entre la cuisine et le bar. Ce qui était inimaginable il y a 15 ans. Aujourd’hui, je travaille avec des chefs étoilés qui, il y a 15 ans, refusaient de me parler.

Qu’est-ce qu’un bon barman ?

Barman, c’est le seul métier où les gens côtoient des gens tous les jours et ne sont pas formés pour cela en tant que tel. Tous les jours, je vais voir des gens, les rencontrer, avec 30 centimètres de comptoir. Mais comment est-ce que je construis cette relation ? Quels sont les marqueurs qui vont dire que toi, quand tu vas venir dans mon bar, tu bois vraiment un bon verre ? C’est ce que j’ai mis dedans. C’est prendre du plaisir. Comment je sais que j’ai réussi ? Comment je valide le fait que tu sois satisfait ? C’est très simple, c’est que tu vas recommander un autre verre. Ça veut dire que tu as aimé.
Le propre d’un bar, c’est de construire une clientèle. Si tu es satisfait, tu vas en parler à trois de tes amis. Et donc finalement les clients deviendront des ambassadeurs de ton bar.

Que penses-tu des réseaux sociaux et de leur utilisation dans la mixologie ?

Les réseaux sociaux ont changé complètement le bar. Il faut que ce soit beau. Mais c’est extrêmement compliqué d’associer une saveur et un goût à un visuel. Or on ne sait pas la saveur qui est derrière un très joli cocktail.
Je me suis amusé à faire une carte avec des produits vaisselle. C’était très beau, magnifique, avec des couleurs chatoyantes. Cela a été liké. Mais c’était du produit vaisselle et de la javel. C’était juste pour dire, comme dit l’expression « Tout ce qui brille n’est pas de l’or. »

Le Mojito est un des cocktails les plus consommés en France. Avez-vous un conseil pour bien le réaliser ?

Le Mojito est un cocktail qui a été créé pour se désaltérer. C’est un cocktail de sortie de plage, il fait chaud, il fait bon, je me désaltère. Et c’est facile à faire, il n’y a pas d’effort. Il faut mettre du rhum à 40°, du sirop de sucre, du jus de citron vert, comme ça ton acidité est constante. Ajouter du rhum et une dose d’eau. Il n’est pas nécessaire de piler la menthe.

Quelles sont tes sources d’inspiration ?

C’est l’amour du goût. C’est une grande phrase, mais pour l’appliquer, c’est une heure par jour de réseaux sociaux parce qu’il y a toujours quelqu’un qui finalement a eu un autre angle d’approche sur un cocktail.
Ensuite les livres. J’ai une énorme bibliothèque que j’ai construite maintenant depuis plus de 15 ans.
Bizarrement je ne vais plus forcément chercher l’inspiration dans les bars.
Je vais chercher des choses sur ceux qui travaillent le goût, l’esthétique, et même la présentation depuis plus longtemps : les chefs cuisiniers. Ce sont vraiment les chefs qu’il faut aller voir. Les techniques des confiseurs, dans le bar, sont fondamentales. Ils savent faire des sirops, les liqueurs. Ils peuvent créer des saveurs qui n’ont jamais existé et c’est ce qui m’intéresse.
Ce matin nous avons eu un cours sur la cuisson de bananes à basse température. Moi ce qui m’intéresse, c’est d’utiliser des méthodes pour faire une double distillation d’une banane à l’arrangé, et voir si je peux après avoir un sirop que je vais faire infuser. Mais l’enjeu derrière c’est de pouvoir l’appliquer à grande échelle, de produire 400 verres dans la soirée. L’enjeu est d’avoir une expertise que tu puisses retranscrire facilement au bar.

Quelle est ta devise ?

Speed is what we do. Quand tu ouvres un bar, ce qui est le plus compliqué, c’est d’avoir du monde et de le garder. Mais quand on a du monde, garder la qualité, c’est compliqué.
Donc c’est « speed is what you do ». Mon autre devise s’inspire des arts martiaux : chaque geste est l’occasion de t’améliorer. Chaque fois que tu vas verser une mesure, chaque fois que tu vas dire bonjour, Il n’y a pas de répétition. Il faut garder en permanence une attention particulière à ce que l’on fait.

Interview réalisée le 12 novembre 2024.
Suivre Stephen Martin sur Instagram :
@stephen.martin.bar

 

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